Avortement - Interruption de grossesse : Pour le droit au libre choix



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Des femmes témoignent – des hommes aussi

Cléa
C’était il y a un an, j’avais 18 ans. Collégienne à Genève, je rêvais d’études d’histoire et d’allemand, de voyages dans le monde entier, je voyais les choses en grand, mon avenir se dessinait peu à peu. En bref, j’étais une adolescente épanouie, rien ne pouvait arrêter mes rêves. Avant même de faire un test, de me rendre compte que mes règles ne viendraient jamais, j’ai su. Il y a des symptômes qui ne trompent pas, et des ressentis si particuliers que je savais pertinemment que quelque chose se passait en moi.
Mais vous savez, il y a toujours cette lueur d’espoir qu’on ne peut enlever à cette jeune fille optimiste que je suis: “mais non, je ne suis pas enceinte, je psychote!”.
Alors vous attendez. 1 jours… 4 jours… 10 jours… 2 semaines… et cette douleur à la poitrine qui persiste, qui grossit, à un tel point que se rendre aux cours d’éducation physique est une vraie torture.
“Mais il faut le faire ce test” chuchote cette petite voix dans ma tête, prise entre deux révisions de maths et de biologie.
Il était 5h20 du matin, mon épreuve de maths avait lieu 3h plus tard. J’ai pris mon courage à deux mains et j’ai fait le test. Jusqu’à la dernière seconde je suis restée optimiste, même si au fond de moi je savais qu’il n’y avait aucun espoir.
J’ai envoyé un message à mon copain; ensemble depuis 1 an, il était au courant de mes doutes depuis le début. C’est un monde qui s’est effondré autour de nous, et des questions qui fusaient dans nos têtes.
Je n’ai pas réussi mon épreuve de maths.[…] j’ai appelé la maternité de Genève et j’ai timidement demandé un rendez-vous pour une interruption volontaire de grossesse. On m’a donné rendez-vous 5 jours plus tard, […]
Tout c’est enchaîné très rapidement […] Je ne me rendais pas compte de ce qu’il m’arrivait, je ne me rendais pas vraiment compte qu’une vie prenait forme en moi.
Comme un cheval lancé au galop,
Comme un coureur sur le sprint final des 100 mètres,
[…] J’ai finalement pris la pilule.
Certains moments vous marquent à vie; celui-ci a laissé une marque au fer rouge dans ma mémoire. […]
Je ne regrette pas mon avortement; rationnellement, c’était la meilleure chose à faire. Mais j’aurais aimé qu’on me laisse plus de temps car j’en avais la possibilité.
Aujourd’hui je suis sur le point de finir mon collège. J’ai toujours des rêves pleins la tête, je veux toujours étudier l’histoire et l’allemand. Je suis toujours épanouie, heureuse de vivre. La vie est pour moi un véritable cadeau. Mais cette partie de ma vie, si courte soit-elle, restera gravée en moi pour l’éternité. Je regarde chaque jour derrière moi, je pense souvent à celle que je serais devenue si je n’avais pas commis cet acte, à l’enfant que serait devenu la petite graine présente dans mon bas ventre.
pour lire le témoignage en entier


Céline, 43 ans
Après des années de galère, avoir connu un mari violent qui me battait, perdu un bébé in utéro après 6 mois et demi de grossesse, j’ai eu le courage de partir, de fuir cet homme et j’ai élevé mes deux filles du mieux que j’ai pu seule. Elles sont grandes maintenant, et j’ai rencontré l’amour, le vrai, depuis 2 ans maintenant. Un homme qui me rend heureuse et avec lequel je m’épanouis. J’ai toujours pris la pilule et n’ai jamais rencontré de soucis de ce côté là. Mais il y a quelques semaines, pas de règles… Dans ma famille, les femmes ont toujours connu la ménopause très jeune, donc je ne me suis pas affolée. Mais lorsque les crampes abdominales ont persisté, plus la fatigue intense, j’ai décidé de faire un test. Ma réaction ont été les larmes intenses, car je m’attendais à tout sauf à cela à mon âge.
J’ai tout de suite su que je n’en voulais pas, pour plein de raisons : à l’âge où je suis, je ne me vois pas tout recommencer, j’aurais eu 10 ans de moins, j’aurais peut être tenté l’aventure avec mon compagnon; mais la raison principale, mon compagnon l’accepte mais ne la comprends pas… Quand j’étais mariée, après la naissance de mes filles, je suis tombée à nouveau enceinte. Et j’ai perdu un bébé in utéro, j’ai gardé cet enfant mort dans mon ventre quelques heures, j’ai dû accoucher normalement, j’ai senti les contractions, j’ai vu ce petit être qui aurait pu être vivant… Ce cauchemar, j’ai trop peur de le revivre, je ne peux pas, non je ne peux pas… En plus, j’ai failli en mourir (septicémie). Alors la décision que j’ai prise fut dure, mais je savais au fond de moi que je ne pouvais pas faire autrement. Mon compagnon, lui, désirait un autre enfant, même à cet âge, cela ne lui faisait pas peur, alors quand j’ai décidé d’avorter, j’ai dû faire toutes les démarches seule: l’échographie chez le gynéco plus une discussion sérieuse et posée, la discussion avec le médecin au centre ivg, la prise des premiers cachets il y a 3 jours et hier la seconde prise de médicament sous surveillance à l’hôpital. Les infirmières ont été si compréhensives, si douces et patientes… Mais j’étais seule dans cette chambre… Attendre seule que les douleurs arrivent et… quand ce ‘moment’ est arrivé, la douleur morale fut si forte, sentir ce qui se trouvait en moi quitter mon corps… Je me sens terriblement seule… J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps…
Nous avons eu une discussion tous les deux hier, près que je sois rentrée. Il ne comprend pas pourquoi je pleure puisque je le voulais, cet avortement. Pour lui si je suis tombée enceinte, c’est qu’inconsciemment je le voulais, pour lui je n’ai pas à pleurer… Comme si on ne pouvait pas en souffrir… Son corps qui change, qui vous rappelle chaque jour qu’un petit être est en train de grandir en vous… Aujourd’hui, j’ai dû retourner au travail comme si de rien n’était. Je ne sais pas encore comment je vais surmonter cela, j’ai l’impression de faire face à nouveau à un deuil.
Je sais que j’ai pris la bonne décision, je ne regrette pas, mais je souffre intérieurement… Si j’avais rencontré cet homme il y a 20 ans, comme j’aurais été heureuse… Je crois que c’est ce bonheur que j’aurais pu avoir qui me rend si triste. J’espère juste arriver à surmonter cela, car j’ai peur que mon couple en pâtisse, j’ai la sensation d’une cassure, peut être est-elle seulement en moi. Il faut que je tente de me reconstruire, mais je sais pertinemment que le chemin va être très long.


Lisa
Avant de répondre à vos questions, MERCI à toutes ces femmes courageuses grâce à qui l’IVG est aujourd’hui possible dans de bonnes conditions, aux féministes actives depuis les années 60 – et avant  – à qui je dois aujourd’hui, probablement, une “tranche” de ma santé mentale et de mes projets d’avenir. Merci aussi à vous qui oeuvrez, par vos actions et ce site, pour informer d’une manière objective.
Quand sur mon test de grossesse la deuxième ligne est apparue, j’ai d’abord paniqué, puis crié, puis marché des heures durant, puis…cherché sur internet. La toile bouillonne de bruitages violents, de morales acides, rances, d’autant plus qu’elles cherchent à atteindre leur but au moment où l’on est le plus vulnérables. Mais c’est sur votre site que je suis d’abord tombée: premier élément d’apaisement, premier retour à la réflexion, premier accès à la lucidité, à Soi: Merci.
L’IVG a eu lieu en janvier 2016, à l’Hôpital d’Aigle. Le pourquoi de la grossesse reste une grande question pour moi. J’ai d’ailleurs commencé une thérapie pour l’éclaircir, et aussi parce que je l’ai promis au bébé que je portais. ça pourrait être la simple conséquence d’une méthode contraceptive pas sûre (j’observais mon cycle). Mais cette méthode a marché pendant 15 ans. Peut-être s’agissait-il d’un acte manqué? Il y a peut-être une ambivalence à creuser.
Je vis avec mon partenaire, que j’aime (notre relation a 4 ans), j’ai deux boulots très importants pour moi (liés à la protection de l’enfance…), une famille aimante.
Le motif? Il y en a mille: je pourrais développer ce qui me freine sur tous les plans (physique, émotionnel, professionnel, familial, spirituel…). Mais peut-être qu’au fond il n’y en a qu’un, de motif: je ne ressentais pas de Désir d’enfant. Et je pense qu’un enfant a le droit d’être profondément désiré pour venir au monde. Je ne me suis pas “accouchée” en tant que mère potentielle; du coup tout m’était inconcevable; tout était source de souffrance.
La décision était donc claire depuis le début. Ce qui n’empêche en rien qu’elle était douloureuse. Le non-désir de maternité n’est pas synonyme de non-attachement. J’ai vécu des sentiments d’attachement, de tendresse, d’émerveillement insoupçonnés. Décision extrême, et extrêmement difficile, donc.
Concernant le procédé, j’étais contente d’avoir déjà des informations (via votre site). Le personnel était courtois, mais plutôt “technique”, bureaucratique. Ce qui était déjà infiniment mieux que la réprobation à laquelle je m’étais préparée… cela s’est résumé en un “donc dans votre cas vous êtes sûre, il n’y a pas d’ambivalence?”. La conseillère du planning a été vraiment accueillante. J’ai apprécié sa disponibilité, et son ouverture à mes positions concernant la prise d’hormones.
La méthode de l’IVG était médicamenteuse. J’ai angoissé avant, à l’idée des contractions, et parce qu’une autre médecin m’avait montré d’un geste la taille qu’auraient pu faire les caillots (comme une main). Le jour du cytotec, j’ai eu mal, oui, mais pas de contractions, et quasiment pas de caillots (j’étais à la 6ème semaine). Le plus pénible, c’était de vivre ce long moment où il ou elle me quittait. La tristesse. L’émotion. Le besoin de rituel.
Oui, j’ai eu des effets secondaires: des petits boutons qui sont apparus à la taille et m’ont pris progressivement les jambes jusqu’aux pieds, avec des démangeaisons insupportables. Mais il paraît que c’est rare (d’autre part je n’ai jamais supporté les pilules pour la même raison).
Oui, c’était la bonne décision. Et pourtant si difficile à vivre. Je suis passée par tous les états (sauf le regret et la culpabilité), et ce n’est pas fini; c’est peut-être le début.
C’est un deuil. Si seulement ceux qui dénigrent ce choix pouvaient s’en rendre compte. Au début j’ai cru que l’IVG allait être un soulagement, pour revenir “en arrière”. En réalité, rien ne sera plus comme avant. Et au fond de moi, je remercie pour cela le petit être qui m’a habitée pendant quelques semaines, car il ou elle m’a donné le Courage d’aller voir pourquoi je ne peux me concevoir maman tout en n’étant pas en paix à l’idée de ne jamais l’être.


Jezabel
J’ai subi une IVG par aspiration début décembre 2012, j’avais eu 20 ans en septembre, j’étais avec mon copain depuis 10 mois. Je prenais la pilule depuis 4 ans déjà, je n’avais jamais eu de soucis, mes règles à chaque fin de plaquette et jamais d’oubli. En septembre, à la fin de ma plaquette, j’ai réalisé que j’en avais oublié une. Je ne m’inquiétais pas, moi et mon copain on ne se protégeait plus depuis nos tests de dépistage et je me disais que c’était impossible que je tombe enceinte après seulement 1 oubli. Mes règles ne se sont jamais pointées le bout du nez, je me disais que c’était un hasard, c’était arrivé à quelques unes de mes amies qui prenaient la même marque que moi. Fin de mon autre plaquette, toujours pas de règles, j’ai peur mais je ne l’avoue pas à mon copain. Je me dis qu’elles vont peut-être arriver un peu en retard parce que je suis stressée. Mi-novembre toujours pas de règles, je fais un test en cachette, il sort positif immédiatement.
Je pleure, j’ai peur, je n’ai jamais été pour l’avortement, mais je n’ai pas la situation financière pour avoir un enfant, mon copain ne travaille pas. Je lui dis, il est fâché, il me dit qu’ils ne le veut pas, qu’on ne peut pas avoir d’enfant maintenant. On ne le dit à personne, je vais à la clinique familiale, je rencontre une infirmière, elle me demande la dernière date de mes règles, elle calcule que j’en suis déjà à 11 semaines, elle me demande si je veux le garder. Je suis incapable de répondre, elle me dit de revenir à la clinique lorsque je serai sûre de ma décision. Je retourne chez moi, je parle à mon copain, je pleure à chaude larme, c’est impossible, ça ne peut pas être vrai, c’est un cauchemar. La décision est prise, même si de mon côté je ne suis pas pleinement d’accord. J’aimerais en parler à ma mère, mais non. Je vais à la clinique 2 jours plus tard, ils n’ont plus de place, alors je dis à la réceptionniste ma situation et elle m’envoie à la clinique familiale dans l’hôpital situé à côté. Elle les appelle, ils m’attendent. À l’hôpital, je donne mon nom, on me dit de m’asseoir, qu’une infirmière va bientôt venir me chercher. 15 minutes passent, c’est mon tour, l’infirmière est gentille et me parle, veut connaître ma situation, je devais avoir l’air effrayée, elle me rassure, me dit que tout se passera bien, elle me fait une prise de sang et me dit qu’un médecin va venir me voir. Il arrive, se présente et me dit de m’installer sur la table, qu’il doit faire une échographie pour confirmer où j’en suis dans ma grossesse. Je m’installe, mais je ne veux pas voir! Il me met le gel (c’est froid!!) et me demande si je veux voir, je ne peux m’en empêcher … Grosse erreur, je vois le cœur battre. Il confirme que je suis à 11 semaines. Il me donne une prescription pour des pilules que je devrai insérer dans mon vagin le mercredi à 3h00 et à 6h00 pour assouplir mon col, et rendez-vous à 7h45 à l’hôpital. De retour chez moi, c’est l’enfer, mais on déménage, ça va me changer les idées. Plus qu’à attendre, chaque soir je pleure en m’endormant, j’aurais tant besoin de ma mère, mais j’ai peur qu’elle réagisse mal. Mardi soir, je confirme avec mon copain qu’il va venir avec moi et je mets mon alarme à 3h00 et à 6h00. 
MERCREDI : 3h00 je me lève, je fais ce que je dois faire, je me recouche. 6h00 je me lève, je recommence et je me prépare pour aller à mon rendez-vous. Mon copain fait semblant de ne pas m’entendre quand je lui dis qu’on doit partir dans 10 minutes, qu’il doit se lever, qu’on a 45 minutes pour nous rendre à l’hôpital. Mais il s’entête à faire semblant de dormir. Je prends mes écouteurs et pars en claquant la porte. Je vais devoir faire face à cette épreuve seule. J’arrive à l’hôpital, nous sommes 6 qui allons subir une IVG. Je me mets en jaquette d’hôpital et on me met un soluté pour me calmer, pour que tout se fasse tranquillement. Je me couche dans un lit, je mets mes mains sur mon ventre, j’ai un moment à attendre, je lui dis adieu silencieusement. Une infirmière vient me voir, elle sait que je suis venue seule et vient m’aider dans cette épreuve. Le médicament agit, je m’endors. On vient me chercher, c’est à moi, je me lève et me rends à la salle, on me réconforte, me dit que je ne sentirai rien, une infirmière me tends la main pour que je puisse la tenir. Le médecin arrive, s’installe et commence, j’ai mal! Je sens quelque chose, mais je ne comprends plus trop mon corps à cause du soluté. C’est fini, l’infirmière me ramène et reste avec moi le temps que je me rendorme, je pourrai partir dans 1 heure 30. Je pars finalement, je dois marcher, j’ai mal. Je vais me chercher des serviettes sanitaires et retourne finalement chez moi.
Mon copain ne me dit rien, je vais me coucher anéantie. Je suis contre l’avortement, mais pourtant je n’ai pas l’impression d’avoir fait quelque chose de mal, je sais que c’est pour le mieux, que cet enfant n’aurait pas eu tout ce dont il aurait eu besoin, mais je me sens vide. Au moins j’ai eu les gentilles infirmières qui m’ont aidée et surtout JAMAIS JUGÉE.
1 an et demi plus tard, j’ai laissé celui qui m’avait mise enceinte. Jusqu’à la toute fin il ne m’a jamais demandé comment ça c’était passé, ce qui m’a fait réaliser que je n’aurais jamais voulu avoir d’enfant avec lui, créé un soulagement de savoir que je n’aurai pas mis d’enfant sans père au monde. Il n’y a pas un jour où je n’y pense pas. Parfois je me surprends à compter quel âge ma crevette aurait mainenant. Aujourd’hui avec du recul, je réalise aussi que ce n’est que grâce au personnel que j’ai pu passer à travers cette épreuve, et jamais je ne les remercierai assez.
Ce témoignage était aussi un moyen de finalement me vider le cœur et laisser la place pour celui que j’aurai en temps voulu.


Indra
Je vivais une très belle histoire d'amour depuis plus de 8 mois. J'avais prévu de mettre un stérilet en cuivre vu que les hormones pour moi ce n'était pas possible… On est parti en vacances… et à mon retour (lui était encore à l'étranger…) j'apprends que je suis enceinte. Je l'ai su 2 jours après mon retard… J'ai dû attendre lundi pour appeler l'hôpital pour un rdv. Je savais que je ne voulais pas un enfant… pas maintenant et surtout que j'avais une grosse opération pour un kyste osseux au bras prévue quelques semaines plus tard… Ils m'ont donné rdv pour le lundi d'après. J'ai pleuré pendant 7 jours, le fait d'avorter c'était horrible pour moi… mon copain est rentré pour être avec moi. Le lundi j'ai parlé avec les médecins et ils m'ont donné le rdv pour l'IVG le lundi d'après (encore une semaine à attendre!!!)… Le jour du rdv on m'a donné plein de médicaments, j'ai passé ma journée à l'hôpital à attendre que "ça" sorte… à 16h j'ai enfin pu partir. On m'a dit que soit c'était déjà sorti, soit ça allait sortir après… Le jour suivant je suis restée à la maison et le mercredi je suis allée me promener… J'ai senti que je commençais à perdre beaucoup trop de sang, j'ai dû changer de serviette hygiénique 3 fois en 1 heure. Je me suis couchée tôt en me disant que ça allait passer…
Le lendemain j'avais mon rdv préopératoire pour mon bras au Chuv. Le temps d'arriver la bas je perdais encore beaucoup trop de sang… Pendant les 5 premières minutes de mon rdv je me suis assise et quand je me suis relevée, il y avait du sang partout, l'infirmière m'a demandé ce qu'il se passait et là tout s'est passé très vite. On appelle les urgences gynécologiques, on me transfère dans le bon hôpital, on me met dans un lit, on me fait des piqûres partout pour réussir une perfusion (avec moi ça marche jamais du premier coup!), et toutes les infirmières n'arrêtaient pas de me dire que si je saignais comme ça c'était tout à fait normal… Après un peu d'attente je vois enfin un médecin qui me fait un contrôle par échographie, et là sur la chaise je commence à sérieusement me vider de mon sang, j'ai la tête qui tourne et le médecin appelle directement les anesthésistes pour une opération par aspiration d'urgence. Je retourne dans le lit et tout le monde s'active autour de moi, pour me préparer pour l'opération: on m'habille, on (essaye) de me refaire une autre perfusion, on me pose mille questions… Quelques minutes après je suis au bloc, les anesthésistes m'expliquent et on me fait une narcose complète…
Et la suite toute le monde la connait: salle de réveil, puis retour maison…. Je n'ai pas eu mal, je suis rentrée chez moi sans aucune douleur, mais ça m'a détruite…
Maintenant j'ai juste besoin d'être seule, je n'ai pas revu mon copain depuis plusieurs jours et je n'arrête pas de me dire que ce n'est pas juste que dans 2 jours je retourne à l'hôpital pour mon bras et que ça commence à faire beaucoup. Je ne regrette pas mon geste mais j'aurais tout fait pour que ça se passe autrement…
Indra n'a pas eu de chance. Elle était une des 0,5% de femmes pour qui une aspiration s'impose en raison de saignements excessifs avec la méthode médicamenteuse de l'IVG (Rem. AM. Rey).


Marie
J'ai 37 ans et je suis enceinte de 17 semaines et 4 jours… Je ne savais pas que j'étais enceinte et je l'ai appris car j'ai été prise de nausées violentes et de vertiges. J'ai fait un test, juste car je suis déjà maman et que je voulais être sure que ce n’était qu'une bonne gastro…(elle a bon dos celle là). Test positif, je m'effondre, je ne veux pas d'enfant. Je me précipite à l’hôpital et mens prétextant des malaises, que je m’inquiète pour le bébé. On me reçoit, me fait une écho…c'est ce que j'attendais, pas pour voir le bébé mais pour avoir une datation pour une IVG. Verdict 11 semaines et 5 jours. Délai de rétractation pour une ivg 2 semaines, je dépasse le terme me dit on.
Je panique. Je rentre de l’hôpital, annonce au papa que j'attends un bébé, lui montre l'écho…il me regarde, sourit, et me dit "cool on va avoir un bébé".
Je n'en veux pas, mais le gynéco me précipite me disant qu'il faut envoyer la déclaration de grossesse vite vite….
Je m’exécute. Mais c'est de plus en plus difficile à gérer.
Je suis psychothérapeute et je connais les signes d'une dépression.
Je commence à être vraiment au plus mal, j'en parle à ma meilleur amie, qui se fait présente comme elle peut.
Puis sur ses conseils en avise mon conjoint, lui parle de ce que je ressens, que je suis mal et que je ne veux pas de ce bébé, que je ne vois pas le bout du tunnel, que je veux mettre fin à mes jours. (je n'ai pas eu de réaction en face, hors mis, "je crois que tu as besoin de repos".)
Je m'enfonce, jusqu’à ce qu'un soir je fasse une crise de tétanie pendant quelques heures. J'appel au secours ma mère, qui arrive très vite, mon père prenant en charge mes deux autres enfants.
Je suis en dépression pré-natale.
A cet instant, je ne pense toujours pas à mettre un terme à l'étranger à cette grossesse. Il bouge et il a le hoquet souvent.
Discutions avec le papa une fois de plus. Le couplet tombe. Après lui avoir redit combien j'étais mal.
Il me dit que toutes les femmes nous pleurons et avons ce genre de comportement.
Je suis dépitée, (toutes les personnes qui me connaissent me définissent comme un rayon de soleil, qui a toujours le sourire et très positive).
Je regarde mon ventre, bien arrondi et lui parle, lui demande ce qu'il fait là, ce que je fais là.
Le lendemain j'ai rdv chez le gynéco, je suis très mal, séparée depuis la veille du papa. Verdict: "-c'est un garçon"…
Je m'effondre à nouveau, je ne veux pas d'enfant et encore moins d'un garçon…( je sais que l'on ne choisit pas le sexe). Je ne vois pas de futur mais que vont devenir mes enfants, ils me font tenir pour éviter que j'attente à mes jours. Je ne sais plus qui je suis. Ce soir là, un autre docteur, appelé dans la soirée, me mettra sous médocs, anxiolytique.
Moi qui suis contre, je prends.
Suite à ça, je décide de sortir la tête de ce gouffre et de mettre un terme à cette grossesse.
Je préviens le papa, ma famille et ma meilleure amie.
Le papa est contre, je cherche des textes de loi qui protègent mon corps et ce qu'il abrite (il est gendarme). Je trouve. De leur côté, mon entourage trouve des témoignages divers et variés sur les ivg.
Prise de rdv chez une psy, je cherche à être aidée sur ma décision mais surtout sur les troubles qui pourraient apparaître après l'intervention. (pas trop pour le fait, ceux que j'ai vus!)….
Prise de rdv aussi au planning familial, ils me donneront l'adresse d'une clinique par laquelle ils passent, j'ai pu poser plein de questions, ils font aussi le suivi gynécologique d’après l'ivg, fournissent les attestations pour l'assurance-maladie, acte d'enfant né mort. Il n'y a aucun jugement, juste de la bienveillance et l'humanité dont j'avais besoin à cet instant. Merci !
J’arrête donc de me torturer la tête, je décide de prendre rdv en Espagne, Gironna. Je pars mardi (le 12.11.13) avec ma maman, l'intervention aura lieu mercredi matin et nous reviendrons que le jeudi dans la journée, pour que je ne sois pas trop fatiguée (car anesthésie générale).
Pour mes amis (autres que ma meilleur amie), familles (autres que mes parents), le bébé aura eu un arrêt cardiaque.
C'est la version qui me convient pour le moment, le mieux, au vu, malheureusement, du regard que la société porte sur les avortements tardifs.
De mon côté, je refuse de faire de cet enfant un non existant, ni une ombre présente d'ailleurs.
Pour mes enfants, pour moi et pour en parler ouvertement autrement que le bébé mort, j'ai décidé de le prénommer "Gabriel"…"Un ange".
Alors j'ai expliqué à Gabriel pourquoi je mettais fin à son existence, que cela n'avait rien à voir avec lui à proprement dire.
Je ne sais pas ce que cela m'apportera par la suite ou si je donne juste bon esprit à ma tête et ce qui s'y passe.
Mais je suis sure que même difficile, voire douloureuse, au fond de mon corps, je prends la décision la plus sage qu'il soit…. pour les suites de l'intervention il faudra attendre.


Fanny
L’IVG que j’ai décidé de faire pratiquer a eu lieu il y a 5 jours. La grossesse était voulue (oui, ça arrive!), pour des raisons plus ou moins inconscientes… D’abord et avant tout le sentiment qu’elle serait “le lien de solidité”, solution à une relation d’amour très forte, et très compliquée en termes géographiques (800 km nous séparent) et situationnel (nous sommes tous deux parents séparés en garde alternée). Avec tout ce parcours de décision et de réflexion (4 semaines environ), je peux aujourd’hui établir plusieurs raisons, qui ont pris le temps de la réflexion pour s’éclaircir :
– J’avais indéniablement besoin de prendre une décision que je n’avais pas pu prendre 4 mois avant, étant tombée enceinte et ayant été incapable de faire un choix : au moment où on m’annonçait une fausse couche je “réalisais” que je voulais le garder… En réalité je ne saurai jamais quel aurait vraiment été ma décision si l’embryon avait été viable, cependant j’ai eu l’impression d’être restée enceinte pendant les 4 mois qui ont suivi cette fausse couche… j’étais obsédée par l’idée de retomber enceinte.
– Mon compagnon s’était fait faire un enfant dans le dos, et cet enfant allait naître et je ne supportais pas ce fait réel, et croyais effacer cet événement avec un autre bébé, conçu d’amour véritable. Je suis tombée enceinte 2 jours après sa naissance.
Je peux dire que j’ai mal vécu cette grossesse dès son annonce… Mon coeur n’était pas paisible et tout s’emballait, je paniquais et réalisais que ce n’était pas du tout le moment d’accompagner une vie, ni pour moi, ni pour mon compagnon, ni pour l’enfant à venir. Mais restait ce besoin étonnant et fulgurant de maternité…
Pour faire le choix, j’ai dû passer par un sentiment de ne plus être amoureuse de mon compagnon, parce que chez moi ce qui était très difficile c’était de renoncer à un enfant conçu avec l’homme que j’aime profondément. Ce détachement passager m’a permis d’y voir clair, de faire le “vide” autour de moi pour prendre MA décision. Sans peur de casser mon couple. J’ai hésité jusqu’au bout du bout. Jusqu’au matin de prise du cachet qui allait stopper la grossesse, jusqu’après avoir pris ce cachet, le lendemain j’ai téléphoné à l’hôpital pour savoir si c’était vraiment trop tard… Tant que je pensais qu’il y avait encore le choix, il m’était insoutenable de supporter la culpabilité de stopper l’évolution d’une grossesse que j’avais voulue! L’infirmière au téléphone m’a dit qu’il était trop tard, que ma décision avait été claire et la bonne parce que la seule possible pour moi au moment. Elle a été formidable, implacable, sûre d’elle, elle a changé ma vision et j’ai pu être en paix quelques 10 h avant l’intervention. En paix oui.
Et je le dis aujourd’hui sans culpabilité et avec grand soulagement : cette aventure a été une lumière pour moi, la question de l’IVG est peut-être une des seules situations où notre libre arbitre est total. C’est donc la décision la plus difficile à prendre, mais si on prend le temps qu’il faut pour faire le vide en soi, c’est une des seules décisions sinon la seule qui nous met en face de ce libre arbitre si difficile à assumer.
J’ai bien vécu l’intervention, tout le personnel a été super, mon compagnon était là et sa présence de l’or. J’ai eu deux jours très tristes ensuite, mais ce n’était pas une tristesse de désarroi, et les émotions qui sortaient n’avaient absolument rien à voir avec du regret ou de la culpabilité. C’était plutôt “lâcher” tout ce parcours, ces interminables semaines de réflexion, de disputes, de colère, de culpabilité, de doutes, de peurs, qui se terminent par, il faut le dire, un passage “sur le billard”, avec anesthésie générale. Et ce n’est pas rien. Après ces deux jours, ma relation avec mon compagnon a frôlé la fin (au passage je signale qu’on ne parle pas beaucoup de comment les hommes le vivent, et c’est un tort je pense), je me suis mis un “coup de pied aux fesses”, et j’ai décidé que je n’avais pas fait tout ça pour m’enfermer dans un mausolée de tristesse, c’est trop “facile”.
J’ai pris une décision que j’assume, je n’oublierai jamais, mais je ne remets pas ma vie en question, ma vie ne se résume heureusement pas à cet événement, comme elle ne se résume pas à d’autres événements très douloureux que j’aie pu vivre. Cet événement me construit, je n’ai pas honte de dire que je suis reconnaissante de cette prise de conscience, de cette maturité dont je ne me croyais pas capable. J’en garde une force indéniable. Je déplorerai juste le jugement de certains, mais même cela m’aide à me respecter et à m’aimer avec mon propre chemin. Si je ne le fais pas, qui le fera pour moi?


Alexandra
J'ai 28 ans, il y a 4 ans je me suis décidée à faire un test de grossesse (simplement pour me rassurer) et je suis tombée de haut à la lecture du résultat… On croit toujours que cela n'arrive qu'aux autres… J'ai fondu en larmes pendant 5 min et puis je me suis prise par la main pour entamer les démarches pour l'ivg. Ma décision a été instinctive, l'idée d'être maman m'était totalement insupportable, je ne voulais pas d'un bébé, mon ami non plus. Cela ne faisait que 4 mois que nous étions en couple, lui encore étudiant, moi jeune diplômée en CDD de 2 mois, le chômage et un retour chez papa maman comme seule perspective d'avenir.
Je me suis rendue le lendemain au centre de planification de l'hôpital, je suis tombée sur une dame plutôt froide mais totalement neutre, elle n'a pas cherché à influencer ma décision, elle m'a fourni une ordonnance pour passer une écho de datation. J'ai passé l'écho 2 jours après, verdict : grossesse de 5 SA et 4 jours. Je suis retournée voir la même dame de l'hôpital qui m'a fourni les coordonnées d'un généraliste habilité à pratiquer les ivg médicamenteuses. 5 jours plus tard, j'ai eu ma consultation chez ce généraliste, qui s'est montré très empathique et m'a conseillé d'en parler à mon entourage pour obtenir du soutien. 2 jours plus tard, j'ai pris le 1er médicament que j'ai très bien toléré. Et puis 48h après, j'ai pris le 2ème médicament qui ne m'a pas provoqué la moindre contraction, juste un fort mal de ventre et à peine 2 min de saignement le jour J. Dès le lendemain, plus aucune douleur, des saignements équivalents à mes règles ont débuté et ils ont duré un peu plus de 2 semaines.
Tout s'est déroulé très vite, au final, ça n'aura pris que 11 jours. Le seul hic a été le comportement ignoble de l'infirmier qui s'est "occupé" de moi le jour de la prise du 2ème médicament et qui m'a laissée dans le doute et l'angoisse, il n'a jamais voulu confirmer l'expulsion de l'oeuf…
Malgré le doute sur la "réussite" de l'ivg et l'attente jusqu'à la visite de contrôle, j'ai globalement bien vécu les choses et même mieux que ce que j'avais imaginé. On parle toujours de l'ivg comme d'un acte douloureux qui laisse des séquelles à vie et au final il n'en est rien pour moi. Dans les jours suivant l'ivg, j'ai même culpabilisé de ne pas culpabiliser tellement ça me semblait bizarre de ne pas souffrir. Mais j'ai compris qu'il fallait que je me fasse confiance et que je n'étais pas anormale.
Aujourd'hui mon ivg remonte à plus de 4 ans et je n'ai pas eu la moindre séquelle physique ou psychique. J'ai ressenti un grand soulagement, une délivrance, et j'ai retrouvé le sourire quand j'ai eu la confirmation de la réussite de l'ivg. Je ne regrette absolument pas mon geste, je sais que j'ai fait le bon choix.
A l'heure actuelle, mon ami et ma famille ignorent encore que je suis tombée enceinte et que j'ai avorté (impossible pour moi à l'époque de leur en parler, trop peur de leur réaction, d'être jugée, ou de les décevoir) mais ce secret ne me pèse pas. Je n'ai donc pas bénéficié de leur soutien lors de mon ivg, mais je n'en ai pas ressenti le besoin.


Nicole
Mon IVG date de vendredi 23 Novembre 2012. Je suis avec mon copain depuis huit ans, au début on faisait attention avec le préservatif, pendant un long moment ce fut comme cela…..
Puis j'ai décidé de prendre la pilule, oublis sur oublis…donc saignement sur saignement, mais jamais aucun problème n'était arrivé, alors j'ai préféré arrêter et continuer en faisant attention… Cela faisait au moins plus de 4 ans qu'il n'y avait toujours rien. Donc apparemment on s'en sortait bien….On faisait aussi attention à la période d'ovulation ….Puis mon copain a un traitement assez fort ce qui me laissait penser qu'il serait stérile….
Puis un jour j'ai commencé à être fatiguée, hypersensible, mes patrons m'énervaient…..pas de règles, mais des douleurs similaires ce qui m'a laissé penser qu'elles allaient enfin arriver…….
Mais non, toujours pas de règles. Un soir j'ai commencé à sentir des brulures d'estomac.
Et là, j'ai compris. Je me suis mise à pleurer du choc. 2 jours après je suis allée faire un test urinaire … positif. J'étais très contente et j'avais peur en même temps, j'ai donc appelé mon copain au boulot pour lui dire, le soir quand il est rentré chez moi il était un peu confus, "arrête de fumer c'est pas bien!!" etc….Il ne savait pas vraiment et moi non plus. Malgré que j'avais envie d'être maman…..Mais je n'ai pas de permis, on aurait dû s'installer chez lui à la campagne a 40 km de mon boulot….il travaille aussi, qui m'aurait emmené. Donc voilà décision prise, je vais au planning familial. Le docteur me donne une ordonnance pour faire l'écho de datation chez un gynécologue.
Verdict 7 semaines d'aménorrhée. Embryon de 9 mm, tout va bien. Je suis retournée voir le docteur pour lui demander comment procéder à l'IVG, J'ai dû vite me décider car délai à peine dépassé sinon c'était par aspiration et ce n'est pas ce que je voulais. Il ma donc donné 3 premiers cachets à prendre, puis 2 autres 48h après à prendre chez moi à 7h. Mon copain est venu, heureusement. Au bout de 20 min j'ai eu des contractions atroces, a me tordre dans tous les sens, le sang coulait, gros caillots. Les contractions s'arrêtaient, reprenaient. Puis quand je me sentais mieux, je suis allée me doucher et là……….c'est sorti…..il était dans le sac ovulaire je suppose, car c'était quelque chose d'assez gros. Jai commencé a faire un début de malaise qui a finit par passer. Après cela, que des saignements normaux. Le pire est passé, plus de souffrance, tant mieux. J'étais très fatiguée, mon copain est resté là pendant 3 jours et me faisait tout car. Jusque là, pas de regrets…..Il est rentré et quelques jours après, les remords sont venus me ronger. Des cauchemars, des pleurs …. Jai commencé à maudire mon copain, car c'est plus lui qui avait pris la décision que moi… aujourd'hui cela fait un peu plus d'une semaine de cela….quelques petits pleurs encore….Malgré que j'avais envie d'être maman…..Je me dis pour me consoler que j'ai pleins de choses à faire avant d'avoir un enfant……..J'essaie de le vivre tant bien que mal….En espérant pouvoir en avoir un autre un jour. Courage à celles qui passeront par là…


Leila
Bruxelles, janvier 2013. Je me sens mal. Très mal. Je n’arrive plus à dormir. Ma tension est très basse. Je suis épuisée. J’ai mal au ventre, des nausées. Je pleure beaucoup. Je dois m’absenter au travail, le temps de comprendre ce qui se passe dans mon corps. J’imagine le pire.
Après quelques jours, maman me propose de faire un test de grossesse. C’est impossible, je suis sous stérilet. Je le fais quand même. Positif. Je ne me sens pas enceinte, je n’ai pas pu connecter avec l’embryon. 
Je suis malade. Je sens que je n’y arriverai pas. J’ai déjà deux enfants, de 4 et  6 ans. J’ai 39 ans, mon mari 44. Maman, notre unique soutien, a 68 ans. Cette fois-ci, ni mon mari ni ma maman n’ont l’énergie nécessaire pour m’entourer. Moi aussi je suis fatiguée : déjà deux amours à gérer, un travail aux horaires fatigants. Je m’imagine avec un bébé que je laisse tomber en pleine nuit, de fatigue.
Je suis de plus en plus mal. Ma tête tourne : que se passera-t-il si je n’ai pas la force physique  de mener cette grossesse à terme ? Pour moi mais aussi pour le futur bébé? Que se passera-t-il s’il y a un problème (risques plus élevés à cet âge quand même ; j’avais bu un peu et pris quelques médicaments, ne me sachant pas enceinte), pour moi ou pour lui ? Que se passera-t-il pour mes deux amours, déjà là et bien réels ?
J’ai peur, très peur. Je panique. Quelle sera notre vie avec trois enfants ? Je n’y arriverai pas. Je ne saurai pas gérer cela. Comment pouvoir leur payer des études, leur accorder assez de temps dans toutes les étapes que la vie réserve ?
J’ai peur, il faut se décider, le délai pour l’IVG approche. Je me décide, c’est la moins mauvaise solution, je me sens mal, je pleure, je pleure, je pleure beaucoup. Je n’ai pas de réel choix.
La veille, j’avais rediscuté avec ma mère et mon mari. Aucun d’eux ne m’ont poussé à le garder. Je ne leur en veux pas, ils sont fatigués eux aussi.
Le jour de l’intervention (8 semaines et 5 jours d’aménorrhée), je verse toutes les larmes de mon corps. La gynécologue me demande s’il faut reporter l’intervention. Je me tourne en larmes vers l’infirmière (équipe très humaine) : « c’est la moins mauvaise solution ». Mais je suis prise d’une tristesse infinie. L’embryon n’a pas souffert. Moi tellement !
Inconsciemment, j’aurais voulu le garder, j’aurais voulu être plus jeune, avoir plus d’entourage, pouvoir assurer à tous mes enfants un avenir digne et leur offrir une mère détendue…
Aujourd’hui, environ un mois après l’intervention, je suis encore infiniment triste quand j’y repense, c’est-à-dire à peu près à chaque minute.
Je ne sais pas quel autre chemin ma vie aurait pu prendre. Mais je sais que l’IVG peut nous arriver à toutes. Que c’est une épreuve extrêmement douloureuse et éprouvante psychologiquement (en tout cas pour moi ce fut le cas). Et que, parfois, on ne peut parler de réel choix. J’allais de toute façon y perdre quelque chose: soit mon corps soit mon cœur. Car la vie nous rattrape.
Accueillir un bébé, ce n’est pas seulement l’aimer ni lui changer ses couches. C’est aussi se sentir assez solide pour pouvoir répondre à tous ses autres besoins, et ce toute sa vie durant.
La tête a parlé. Pour le cœur, c’est autre chose…

« Qui connaît la douleur, le chagrin
Que les femmes nourrissent dans leur ventre ?
Qui écoute les mots et la chair
Que les femmes portent dans leurs chants ? »
Betty Boren, Women’s Choir (Martin Winckler, Le Chœur des femmes)


Émilie
je vis au Québec, à Montréal et mon avortement fut effectué en ce lieu il y a 7 mois. J'ai 25 ans, j'ai la chance incroyable d'avoir un petit garçon de 3 ans et demi et je désirais fortement un deuxième enfant. J'ai travaillé 2 ans comme éducatrice à la petite enfance. Actuellement, je complète un mémoire en sociologie pour me spécialiser en sociologie de la famille et je travaille comme agente de recherche pour une Fondation qui a pour intérêt la réussite éducative des enfants défavorisés. Bref, je suis une amoureuse des enfants!
J'ai été en couple 8 ans avec le père. J'avais l'espoir de fonder une famille unie et ne pas laisser trop d'années s'écouler entre le premier et deuxième enfant. Mon ex également avait ce désir, mais il avait beaucoup de problèmes personnels à gérer. Malgré sa bonne volonté, il fut un père absent. Il ne trouvait pas l'énergie de souhaiter bonne nuit à notre fils à son retour du travail. Quoique ce fut planifié, lorsque je suis tombé enceinte à nouveau, ce fut la panique pour le papa. J'ai alors ressenti une énorme boule d'inconfort et d'angoisse: devoir à nouveau m'occuper seule de l'enfant à venir. Je voulais toutefois garder ce bébé avec qui je m'étais déjà attaché.
Le destin a mis sur ma route un homme, père de famille également, mais d'une petite fille qu'il peine à voir suffisamment en raison que la mère est éloignée géographiquement. Il ne désire pas d'autre enfant. Je suis tombée littéralement en amour avec lui et ce fut réciproque. Avec un grand regret, j'ai abandonné le rêve du deuxième enfant, je me suis séparée et j'ai avorté pour aménager avec cet homme. Nous avons une garde partagée pour notre fils, qui a enfin pu connaître son père.
Je n'ai pas ressenti de soulagement, mais une profonde tristesse puisque je désirais le 2e enfant. Je me suis donnée la chance de vivre dans de meilleures conditions de vie par ce choix avec un partenaire avec lequel j'ai plus d'affinités. Il importe, dit on, d'assumer ses choix… J'ai eu la mal chance de retomber enceinte avec le nouveau compagnon (résultat d'une interaction avec la pilule et des antibiotiques). Le nouveau compagnon a énormément insisté pour que j'avorte, ce que j'allais faire naturellement dans l'idée que je ne pouvais pas le forcer à devenir à nouveau père. J'ai eu une fausse couche au final. Aujourd'hui, il ne se passe pas un jour sans que les larmes coulent sur mon visage. Je profite des moments avec mon garçon, mais en dehors de ces instants de joie, la vie a perdu son sens. Lorsque je vois des bébés, une douleur surgit, je ne pense qu'à retomber enceinte.
Mon expérience me porte à croire que lorsqu'on avorte, il faut le faire avant tout et primordialement pour soi et ne pas se laisser influencer. Je regrette cet avortement, je réalise qu'au fond de mon coeur, je voulais le garder et je possédais les ressources en moi pour bien m'en occuper. J'ai eu mon garçon au début de la vingtaine, sans diplôme. J'ai travaillé sans cesse, j'ai fait des demandes d'aide d'urgence alimentaires, j'ai poursuivi mes études, j'allais presque tous les jours au parc ou à la piscine avec fiston, je lui lis une petite histoire avec joie le soir… J'ai reçu un faible support de ma famille, qui désapprouvais mon choix de devenir mère. Je suis extrêmement fière de mon fils, le voir grandir m'apporte la joie la plus intense qui soit. Bref, avoir un enfant, c'est un sacrifice de soi énorme, mais lorsqu'on est prêt à le faire et qu'on a la volonté d'aller chercher les ressources nécessaires, que l'on soit pauvre ou riche, avec ou sans diplôme, jeune ou vieux, avec ou sans soutien des autres, il ne faut pas hésiter! Un enfant l'ignore qu'il est pauvre, ce qui compte, c'est un parent, un seul, qui le désire à 100%.


Sandra
C'était en novembre 2010 en Normandie. J'ai aujourd'hui 36 ans et je n'ai pas d'enfants.
J'étais avec mon ami depuis 1 an et nous voulions sceller notre union par un enfant. J'ai donc arrêté la pilule et nous rêvions de notre vie à deux. Nous allions emménager ensemble. Nous parlions de prénoms possibles, il me disait que je serai une bonne maman…..
Puis je suis tombée enceinte, je l'ai su assez tôt car je faisais la courbe de mes températures et cela s'est confirmé par un test. Le soir même je l'ai dit à mon compagnon, il avait l'air surpris (ce n'était que 4 mois après l'arrêt de la pilule) mais sans plus… J'ai senti que quelque chose clochait… Le lendemain matin floppée de texto très méchants et menaçants à mon encontre… Retournement total de situation, d'un bonheur intense d'être enceinte je passe au cauchemar le plus atroce. Cet homme n'avait même pas le courage de me parler…. c'était juste un harcèlement de texto, où il parlait de cet enfant comme d'un meuble qu'il fallait retourner à l'envoyeur….
Au début, il était hors de question que j'avorte. J'avais tout fait pour avoir cet enfant et maintenant je devais mettre fin à sa vie car son géniteur était un lâche manipulateur? Je pleurais nuit et jour, seule, isolée…. ma mère a fait 500km pour me soutenir car elle s'inquiétait. J'ai été prier, car oui en plus je suis chrétienne et l'idée de l'avortement me paraissait contre nature dans mon cas puisque j'avais désiré cet enfant….
Le père est revenu sur sa décision une semaine après mais il était trop tard…. Il m'a dit: "d'accord on va l'avoir cet enfant sinon ca va te détruire"….
Me détruire? Il avait déjà tout détruit…. à ce moment là je n'ai plus ressenti dans mon ventre un BB mais un foetus… le lien affectif avait disparu. Je ne voulais pas l'enfant d'un lâche et être lié à cet homme à vie….
J'ai été à l'hôpital, c'était horrible car il n' y a pas de "pièce spéciale avortement"… j'étais dans la salle d'attente avec toutes les autres femmes enceintes… En voyant le gynéco je me suis effondrée en larmes…. J'ai eu 2 échos ou j'ai vu les images… à la deuxième il m'a même dit "il est bien accroché"…..
Après avoir annulé 1 fois l'avortement j'ai fini par le subir sous forme médicamenteuse à 5 semaines de grossesse. J'ai passé une journée à l'hôpital pour l'expulsion. Heureusement ma mère était là car c'était horrible à vivre… du sang qui n'en fini pas de couler où vous imaginez voir des choses….
Pendant un mois j'ai eu des pertes de sang… c'était insupportable et interminable.
J'ai pu avoir grâce à l'hôpital un suivi psy gratuit le temps que je voulais et cela m'a aidée à parler…
J'étais soulagée sur le moment d'avoir avorté car cela était la seule solution, mais la décision a été le moment le plus douloureux et aujourd'hui encore il m'arrive de pleurer sur cet enfant que j'ai perdu, surtout que je ne suis pas sure de pouvoir rencontrer un homme et envisager de nouveau de faire un enfant……
Je ne regrette pas mon choix de l'avortement, mais je regrette d'être tombée sur cet homme….


Audrey, 24 ans
J'ai avorté il y a 1 mois, 18 Octobre 2012.
Mon ami avec qui j'étais depuis 3 ans m'a quittée brutalement en avril dernier. Je ne m'y attendais pas, nous étions heureux ensemble, nous envisagions même de vivre ensemble dès septembre. Mais du jour au lendemain il m'a annoncé froidement qu'il pensait ne plus m'aimer. La rupture a été très douloureuse puisque folle amoureuse de lui je n'arrivais pas à être sans lui et lui ne voulait pas me laisser partir. On s'écrivait régulièrement, on se voyait aussi parfois. A mon retour de congés d'été il est venu en pleine nuit s'excuser du mal qu'il me faisait et on a craqué. Je ne prenais plus la pilule depuis notre rupture, mais je ne me suis pas inquiétée plus que cela, il m a dit qu'il n'était pas allé jusqu'au bout.
J'ai attendu mes règles le mois suivant. Toujours rien, 2 semaines de retard. Je me sentais épuisée, je ne rentrais plus dans mes sous-vêtements je mangeais plus que de raison, j'avais des nausées. Je me suis décidée à faire un test. Positif. Le ciel me tombait sur la tête. Je n'ai rien dormi de la nuit, en pleurs.
J'ai appelé mon ex-ami le lendemain à la 1ère heure pour lui annoncer. Il était très calme. Il m a fait comprendre bien évidemment qu'il ne voulait pas de cet enfant. Je ne faisais plus partie de sa vie, il était très occupé au niveau professionnel et surtout il y avait une autre femme dans sa vie depuis quelques semaines.
J'ai fait l'écho de datation dans la foulée. 5 semaines de grossesse et 7 SA. Le médecin était très gentille, elle a vu ma détresse et mon désarroi. C'était dur de voir cette vie dans mon ventre sur l'écran de contrôle, j'ai entendu ses battements cardiaques. Mais je savais que je n'avais pas le choix, j'ai une situation stable, mais je ne voulais pas que mon enfant grandisse avec un père absent qui ne veut pas de lui.
J'ai pris rendez-vous au centre d'orthogénie des hôpitaux civils de Lyon. Personnel extrêmement gentil et compréhensif. Intervention prévue 3 semaines plus tard. Je savais que ce serait très difficile de vivre avec cette vie en moi durant ces semaines. A présent j'avais conscience d'être enceinte. Je portais la vie de l'homme que j'aime, c'était même tout ce qui me restait de lui au final. J'ai eu le temps de m'attacher à cet embryon.
J'ai donc très mal vécu cette IVG par aspiration. En pleurs du début jusqu'à la fin malgré le grand soutien du personnel hospitalier et celui de mon ex-ami qui a fait la démarche de m'accompagner durant cette épreuve.
Je n'ai presque pas eu de douleurs physiques, la plus insupportable des douleurs était surtout celle qui se trouvait dans ma tête et dans mon coeur. Je me suis sentie meurtrie et la seule chose dont j'ai eu conscience durant l'intervention c'est ce bruit d'aspiration. C'était fini. La vie que je portais en moi n'était plus là.
J'y pense tous les jours et je me demande ce qu'est devenu ce petit embryon de quelques centimètres, je me demande à quoi il aurait pu ressembler, je me demande si cela aurait été une fille ou un garçon. Je regrette ce geste qui s'est imposé à moi par pur "bon sens".
J'ai pris rendez vous avec un psychothérapeute et je suis sous anti dépresseurs depuis quelques semaines. J'ai perdu l'appétit, le goût à la vie. Aujourd'hui je dois faire le deuil de la relation que j'avais avec l'homme que j'aime, mais aussi celui de la vie qu'on a conçue malgré nous dans un dernier élan de tendresse et d'affection.
J'ai retrouvé quelqu'un qui partage ma vie depuis peu, mais je n'arrive pas à m'attacher, à le rendre heureux et je le fais beaucoup souffrir.
Courage à toutes celles qui passent par cette épreuve qui, parfois, s'avère être un choix sans vraiment l'être au final.
Et aussi paix à tous ces petits êtres arrivés au "mauvais" moment ou simplement pas conçus avec la "bonne" personne.


Caroline
Je ne me suis jamais préoccupée du droit à l'IVG avant d'y avoir moi-même recours. C'est après mon interruption de grossesse que j'ai réalisé qu'avoir le choix était une chance.
Agée de trente ans, je suis en couple depuis 2 ans. Mon partenaire et moi avons emménagé il y a à peine un mois et, assez ironiquement, la conception remonterait au jour de la signature de notre bail. Ces dernières semaines ont été passablement stressantes et chargées pour nous. Outre la recherche d'un logement, j'ai vécu le deuil d'une personne proche ainsi que d'importants changements professionnels. Ces bouleversements m'ont rendue moins vigilante quant à mon mode de contraception. Quelques oublis de pilule ont suffi à ce que je sois enceinte.
Suite à des modifications physiques et à un important retard de règles, je me suis résolue à acheter un test de grossesse. Le résultat positif m'a beaucoup émue. J'ai immédiatement averti mon partenaire qui a été très étonné. Nous n'avons pas pu en parler immédiatement. Passé l'état de choc, nous avons longuement discuté aux différentes options qui s'offraient à nous. Mon ami m'avait déjà dit qu'il ne souhaitait pas avoir d'enfant mais m'a clairement signifié qu'il me soutiendrait quelle que soit ma décision. Je pense aujourd'hui que son attitude m'a aidée à faire mon choix en toute sérénité.
Au niveau médical et pratique, le planning familial PROFA de Lausanne m'a orientée et conseillée dans ma décision. Outre la confirmation de ma grossesse, j'ai eu plusieurs entretiens (avec et sans mon compagnon) avec des conseillers compétents et chaleureux. C'est également cette structure qui m'a fourni les modalités des différents modes d'avortement et les possibilités quant à un autre moyen de contraception plus adapté.
A l'heure où j'écris ces lignes, l'opération vient d'avoir lieu. Je suis naturellement fatiguée mais aussi soulagée. Je souhaiterais rappeler à celles et ceux qui s'acharnent à vouloir nier un droit fondamental qu'un avortement n'est jamais facile ni "sans douleurs".


Emeline, 30 ans
Je suis blogueuse à temps plein. J'ai eu une IMG à 19SA (interruption médicale de grossesse) il y a 9 mois. J'ai écrit cette histoire sur mon blog, comme une sorte d'exutoire.
Ce matin, j'ai eu un commentaire particulièrement virulent me traitant de mauvaise mère, disant combien j'ai dû faire souffrir ce pauvre petit, qu'il n avait pas eu de chance de tomber sur une mère comme moi, etc. etc. J'en ai pleuré pendant 2h. Depuis l'IMG j'ai enchaîné les fausses couches, donc oui je suis largement punie s'il n'y a que ça pour faire plaisir aux gens…
Evidemment il ne s'agissait pas d'une grossesse "non désirée", mais sur les forums notamment les paroles envers les femmes abortives ne sont pas toujours très sympathiques… Je pourrais faire partie des personnes qui jugent ou dénigrent puisqu'après tout, je n'ai pas demandé à perdre mon bébé, mais il n'en est rien.
Je voudrais tellement que les mentalités changent et que l'ivg ou l'img ne soient plus assimilées à des actes criminels! Parce que je vous promets que l'IMG est aussi dans la ligne de mir de certains!
Je n'avorterai plus. Même en galère je ne pourrais pas, c'est donc pour cela qu'après ma dernière grossesse je réclamerai une contraception béton. Seulement posez moi la question un an auparavant et je vous aurais dit que OUI je préfère avorter plutôt que mettre au monde un enfant dans de mauvaises conditions. Un avortement n'est pas non plus une partie de plaisir, mais c'est une chance que l'on a, et c'est une chose qu'il faut absolument préserver.
Je sais que je ne suis pas sur le bon site, mais j'avais besoin de le dire. Je suis fâchée, furieuse, j'ai l'impression d'avoir un combat à mener.


Anouk
Je me suis fais avorter en Hollande à 18 semaines. Je sais que c'est tard, mais j'ai fait un déni de grossesse. Quand les gens m'en parlaient j'avais l'impression d'être une autre. Je n'aimais pas le père, c'était passager. Je sors d'une histoire douloureuse avec le père de ma fille âgée de 4 ans. Je ne me suis pas sentie soutenue pour les démarches. Seule ma gynéco m'a véritablement aidée, elle m'a donné tous les choix et m'a parlé de leurs conséquences quand je me suis effondrée dans son bureau. Après, c'était la galère, trouver une clinique, faire les échos de datation, trouver l'argent – le coût de l'ivg est de 980€ sans compter le voyage et l'hébergement; j'ai eu très peur, mais le personnel là-bas est ouvert, prévenant, ne porte aucun jugement, c'est une affaire de femme, et tout s'est bien passé, aucune douleur après, j'étais sereine. Mieux vaut ne pas donner la vie que de rendre un enfant malheureux car abandonné ou gardé contre notre gré, il y aurait eu beaucoup plus de conséquences. J'assume mon choix.


Anémone
J'ai subi une interruption de grossesse le mercredi 22 juillet 2009 aux HUG. J'adore les enfants, j'ai toujours rêvé d'en avoir 4, mais là ce n'était vraiment pas le moment, je venais de me mettre avec mon copain, je suis toujours aux études….
J'avais choisi la méthode médicamenteuse car les médecins et les infirmières m'avaient dit qu'elle était fiable à 95% et la chose la plus importante c'était d'y croire. J'y ai cru comme tout être humain qui veut absolument quelque chose. Je ne désirais pas cet enfant.
Cependant, les choses ne se sont pas déroulées comme il le fallait et j'ai fini par faire une hémorragie, car je n'avais pas évacué le reste du matériel placentaire. Au final, j'ai dû subir un curetage.
Si c'était à refaire ? Je le referais sans hésitation, mais je choisirais le curetage… J'ai été énormément affectée par l'hémorragie… tout ce sang que je perdais… Tout cela parce que la méthode médicamenteuse n'a pas marché pour moi, j'ai été une de ces 5 sur 100 femmes…
Le tout – avec les deux interventions et tous les examens – a coûté plus de 4000.- CHF, heureusement que l'assurance de base rembourse, car je ne sais pas comment j'aurais fait….


Thebe
Je suis mariée et mère d'une petite fille de 4 ans et demi. Ma première grossesse s'était mal passée : vomissements, nausées et hypersalivation, j'ai trop déprimé, ça a duré 9 mois et 4 jours. Après mon accouchement, je me suis juré de ne plus tomber enceinte, tellement j'étais dégoûtée de ma grossesse. Je suis tombée enceinte 2 ans après et là la rebelote, j'en pouvais plus, rapidement j'ai pris rdv avec mon médecin pour une ivg médicamenteuse qui s'est bien passée.
L'horreur, comme je ne tolère aucun moyen de contraception, encore enceinte, mais cette fois je me suis fiée à ceux qui m'ont dit que les grossesses ne se ressemblent pas, et cette fois c'est bon, mais rien de tout ça, malade du premier jour de grossesse : hypersalivation, nausées, aigreurs, maux de tête et tout le paquet, mon médecin m'a mise en arrêt de travail pour un mois, renouvelable. Tout cela pour vous dire : ne vous fiez pas aux autres, j'aurais dû faire une ivg, je souffre terriblement, je suis coupée du monde, ce n'est que 9 mois je sais, mais c'est pesant sur mon moral, sur ma vie, je me suis trop délaissée et j'ai délaissé ma famille. Ne vous laissez pas intimider, faites votre choix, car moi, je regrette. À 8 semaines de grossesse, j'hésite, mais au fond de moi, je souhaite que mon calvaire se termine.
bon courage à toutes


Dina
Mon histoire est un peu complexe et un peu longue. Je suis l'exemple de la femme qui a très mal vécu l'IVG.
Si mal, que je me suis laissée avoir par un site anti-ivg que j'ai pris pour un site d'infos et d'aide alors que leur seul but est de pêcher des témoignages négatifs de femmes désespérées pour étayer leurs arguments pro-vie. Une honte!
Voilà les faits:
– L'IVG a eu lieu il y a un an, par médicaments, chez un gynécologue privé à Paris.
– La grossesse était accidentelle. Nous pratiquions la méthode naturelle (calcul du jour de l'ovulation) avec des spermicides en crème (inefficaces).
– Je voulais garder l'enfant. Il est évident que je ne l'avais pas vraiment désiré, mais j'avais 28 ans, une situation assez stable, et une copain dont je suis encore amoureuse et que je connaissais déjà très bien. Et puis j'avais déjà avorté il y a 5 ans, après 3 mois de doutes et d'hésitations et je ne voulais pas revivre cela.
– Quand j'ai appris la grossesse, j'ai été remplie d'un sentiment de joie intense, difficilement contrôlable.
Mon copain par contre, a réagi très violemment. Il était absolument hors de question pour lui d'avoir un enfant. Je connaissais sa position générale vis-à-vis de la question des enfants (il n'en désirait pas du tout), mais j'ai été extrêmement choquée par sa réaction. Il souffrait d'angoisse depuis quelques années et le fait de voir mon désir d'enfant aussi nettement l'a fait paniquer sur l'avenir.
Il m'a accusée d'avoir fait un bébé dans son dos, de le mettre au pied du mur, de lui reprocher son avis personnel sur la question. Et puis, pour finir, il a "menacé" de partir assez loin pour qu'on se croise jamais si cet enfant naissait.
Mon sentiment de joie s'est transformé en quelques minutes en cauchemar.. Vu le contexte et ses reproches insupportables, j'ai avorté sans plus réfléchir, dans les jours qui ont suivis, chez un médecin de ville pressé et qui n'a pas respecté les délais.
En bref: j' ai vu ce médecin 3 fois, dans son cabinet privé.
La 1ere fois :  je lui ai fait part de mon désir d'Ivg, il m'a fait signer un papier, fait une écho et m'a dit qu'il fallait aller très vite sans aucune explication. Il m'a donné RDV 2 jours après pour la mifégyne.
La 2ème fois : 2 jours après, j'ai passé 5 minutes dans son cabinet pour gober les comprimés de cytotec.
J'ai expulsé chez moi, 2 jours après, dans des douleurs insupportables.
Après 15 jours de saignements normaux, j'ai fait une infection due à une rétention. Odeurs, pertes étranges, mal de ventre: je vais aux urgences.
Aux urgences d'un hôpital public, ils m'ont prescrit du cytotec pendant 15 jours supplémentaires, pour éviter une aspiration.
La 3ème fois que j'ai vu le médecin, c'était un mois après l'IVG, pour la visite de contrôle: "Tout va bien. La rétention, ça arrive. Au revoir."
Je n'ai vu aucune équipe médicale, pas une seule femme, pas un seul psy ou autre accompagnant. Ma détresse était telle que j'ai laissé faire le médecin sans broncher.
Aujourd'hui, un an après, je ne suis pas totalement remise. J'ai accepté l'avortement en tant que tel, parce qu'il était inenvisageable de garder un enfant avec un père défiant et dans ce contexte de détresse affective. Et je n'ai jamais voulu faire un enfant seule.
Mais je n'ai jamais accepté les conditions de sa réalisation. Je ne pardonne pas au médecin de n'avoir rien perçu de ma souffrance. Je ne me pardonne pas de n'avoir pas été plus forte et de ne pas avoir pris mon temps pour me reposer un peu avant l'acte lui-même.
Et la réaction de mon copain et la rupture qui a suivi…je vous laisse imaginer quelles traces cela a laissé.
Après l'IVG, j'ai fait des crises de nerfs, des crises d'angoisse, j'ai pensé au suicide aussi.
J'ai vu 3 psychiatres, qui m'ont prescrit des antidépresseurs, mais  je ne les ai jamais pris. (Je suis contre), j'ai aussi commencé une psychanalyse gratuite dans un cmp (je n'ai plus les moyens de faire autrement), que j'ai stoppée assez rapidement, à cause de sa méthode lacanienne que je rejette.
Une longue dépression durant laquelle j'ai lâché mes études. Revenir d'un tel chambardement n'est pas simple au quotidien. J'ai vécu un traumatisme, dans une vie qui n'a déjà pas toujours été facile.
Quant à mon copain, je l'ai quitté plusieurs mois, ce qui n'a rien arrangé. Nous nous sommes retrouvés récemment, sur la base d'une nouvelle confiance. Il s'est rendu compte de ce qu'il a fait, et il veut soigner ses angoisses qui l'ont mené trop loin dans la défiance.
Il s'est rendu compte également de la domination excessive qu'il a exercée sur moi, sur mon choix et mon désir. En discutant avec des féministes, il a eu comme une révélation sur ce qu'il a pu traverser avec moi. J'ai subi seule les conséquences de son pétage de plomb, c'est mon corps qui a pris les coups, pas le sien. Sa réflexion m'a redonné confiance en lui.
J'ai mis du temps, mais aujourd'hui, je comprends sa réaction et sa présence me rassure vraiment.
Nous pensons même à faire un enfant, si nous arrivons à être vraiment heureux ensemble à nouveau.


Samuelle
Contente de pouvoir apporter mon témoignage et surtout besoin de vous le faire partager.
J'ai 38 ans et suis mère de 3 garçons de 16, 15 et 9 ans. Depuis septembre 2009, ils vivent avec leur père dans le Sud Ouest. Moi, je vis dans le Nord Pas de Calais : 900 km nous séparent. A chaque vacance, je pars les rejoindre chez ma mère.
Le 1er février dernier, j'ai découvert que j'étais enceinte : un accident.
Je ne prenais plus de contraceptif oral depuis un an. Mon gynécologue m'ayant déconseillé de prendre des hormones à mon âge et moi refusant les stérilets (avoir qq chose dans mon utérus… non).
Bref, n'ayant pas une relation suivie mais mon partenaire utilisant des préservatifs, je pensais être à l'abri surtout à l'approche de 40 ans où l'on est moins fertile. Il aura fallu une seule fois et pas grand chose puisque je pensais que mon partenaire s'était retiré…
Devant qq signes (seins tendus, fatigue et prise de poids inexpliquée), je lui demande s'il n'a rien oublié et là, je commence à prendre peur. N'y tenant plus, j'achète un test que je réalise en fin de soirée : positif.
J'ai pleuré une bonne partie de la nuit. Pour moi l'IVG : impensable. Et je dois dire qu'une dernière grossesse, une petite fille (celle dont j'avais toujours rêvé)… J'étais tiraillée.
Mais bon, devant le refus de mon partenaire, j'ai décidé d'agir vite. J'ai pris ma journée et me suis rendue chez mon généraliste pour lui demander comment faire pour avorter. Il m'a dirigée vers un hôpital un peu éloigné de mon domicile en m'expliquant que j'y serais mieux prise en charge psychologiquement. L'éloignement me convenait très bien : pas envie que l'on sache ce que j'allais faire.
Devant les deux choix qui s'imposaient à moi, j'avais honte. Honte de garder cet enfant et de l'élever seule, honte de me faire avorter. Mais bon, mettre un enfant au monde sans père, je ne voulais pas. Il avait besoin d'un père et d'une mère. Dès lors que son géniteur refusait cette grossesse, l'IVG s'imposait à moi.
Je fis donc ma prise de sang qui fut positive, j'étais enceinte depuis le 15 janvier.
Ce qui fut lourd : c'est de voir mon corps se transformer et surtout le fait d'interrompre cette grossesse ne m'enchantait pas, mais il fallait faire vite, ne pas s'attacher… Ayant eu deux dernières grossesses difficiles, je me disais que seule, j'aurais fini par faire une fausse couche. En effet, pour mon 2ème enfant, je fus alitée à la maternité à partir de 6 mois 1/2 de grossesse: mon col s'ouvrait. Et rebelote, pour le 3ème, mais cette fois-ci à 2 mois 1/2 : col ouvert et raccourci donc alitement et cerclage à 4 mois. Donc l'IVG s'imposait à moi.
Je suis allée chez le médecin le 2 février. J'avais rendez vous au service d'orthogénie de l'hôpital d'Armentières pour le lundi 15 février. Le problème, c'est que je devais rejoindre mes enfants dans le sud ouest le weekend du 19 février. Repousser l'IVG, c'était continuer la grossesse, m'attacher et surtout bcp de fatigue, car à compter du 2è mois, la grossesse me fatigue tellement que je suis dans un état dépressif. J'aime mes enfants, mais la grossesse n'est pas une sinécure pour moi …
Donc le 15 février, c'est le coeur léger que je me rendis à l'hôpital. D'autant que je commençais à rentrer dans cet état de léthargie que je redoute tant. J'avais refusé la présence du géniteur. Celle-ci aurait été un véritable "crève coeur". Devant la violence de son refus, et la colère de me retrouver enceinte malgré moi, je me suis dit "je ne vais pas être la seule à ruminer pendant 15 jours !" et je lui ai donc fait croire que j'avais fait le choix de poursuivre ma grossesse.
J'ai été formidablement accueillie par le personnel soignant du service d'orthogénie. On me fit prendre le premier comprimé. Je devais revenir le mercredi 17 février pour prendre les derniers comprimés.
Tout s'est bien déroulé : qq légers saignements marrons le mardi soir…. Lors de l'hospitalisation du 17 fév : aucune douleur, juste ma tension qui était descendue quelque peu… Donc aucune inquiétude. C'est au moment de quitter le service que j'ai eu mes premiers saignements. De retour chez moi, à partir de 19h et jusqu'à 1h30, j'eus d'énormes saignements suivis de caillots, je sentais de petites contractions indolores. La fréquence des caillots m'obligeaient à me changer sans arrêt. C'était épuisant. Je me suis réveillée vers 5h15 après peu d'heures de sommeil. A mon agréable surprise, je ne saignais presque plus. Le seul hic : après avoir pris ma douche, j'étais debout, la tête légèrement penchée vers l'avant à examiner des papiers qd soudain une envie de vomir me surprit. Je me sentis partir vers le bas, je ne contrôlais plus rien. Je finis par me laisser tomber par terre. Là, je me suis sentie revenir à moi. C'est tout doucement que je pris mon petit déjeuner, que je me rendis au travail.
Le samedi, je pris la route pour Toulouse, au moins 8 heures de route m'attendaient…
C'est avec une grande joie que je retrouvais mes garçons.
Je fis ma prise de sang de contrôle sur mon lieu de vacances le lundi, comme prévu. Quand je pris ma douche le mardi (soit 6 jours après la prise du deuxième médicament), je perdais du sang sous la douche. Les saignements reprenaient de plus belle avec caillots !!!
J'étais déboussolée : personne ne savait que j'avais subi une IVG !!! De plus, l'hôpital me téléphona et m'informa que ma prise de sang de contrôle était mauvaise : mon taux HCG était aussi élevé que le 15 février ! Quelle horreur…
Je me mis à craquer et là, mon frère m'invita à me confier. Sur ses conseils, j'appelais le centre d'orthogénie qui me conseilla de me rendre aux urgences. Le médecin de garde décida de me faire subir un curetage. Le lendemain : malaise de nouveau pendant la toilette… Bref, j'étais très faible.
Le gynécologue m'a expliqué ce qu'il avait fait… m'a prescrit la pilule que je me suis empressée de reprendre, même si pour l'instant je n'ai pas la tête à ça… Je ne veux pas revivre ça.
Il y a pire que moi c'est sûr… Des femmes qui perdent leur enfant et subissent aussi un curetage et j'en passe…
Le personnel soignant que ce soit à Armentières ou à Toulouse, a été adorable… C'est juste le fait de se vider de son sang qui est désarmant…
Je fais partie de ces 5% de cas pour qui l'IVG médicamenteuse n'a pas bien tourné. Mais le message que je voudrais faire passer c'est que "toute femme qui a subi une IVG ne doit pas être sévère avec elle même". Cet acte n'est pas anodin et ce n'est pas de gaité de coeur qu'on le fait…. C'est tout simplement qu'il est préférable d'y recourir plutôt que de poursuivre une grossesse qui n'est pas désirée pour x raisons.


Nora
Je vis actuellement une situation de détresse sans nom et votre site est une lumière dans le tunnel que je traverse depuis quelques semaines.
Avant tout laissez-moi vous raconter mon histoire: j'ai 30 ans, je suis mariée depuis 5 ans, mon mariage a été un chemin de croix fait de séparations, moments de bonheurs fugaces, moments de violence psychologiques, parfois physiques, et allez savoir pourquoi j'ai laissé passer le temps sans jamais avoir le courage de divorcer..
Dans ce parcours chaotique ,j'ai cru qu'avoir un enfant me donnerait enfin du recul et donnerait un sens à ma vie. Voilà, je tombe enceinte et dès le départ je n'arrive pas à me sentir épanouie.
Une fois de plus, alors que j'avais 1000 raisons d'interrompre ma grossesse à un stade très précoce, je laisse passer un temps précieux. Je me décide enfin à prendre les choses en main et je prends rdv pour une ivg et là le cauchemar! je précise que je suis aujourd'hui à 10 semaines de grossesse (12 s. d'aménorrhée) et que j'ai eu affaire à l'hôpital à des fous!
Je vois un médecin qui me dit que lui ne fera pas l'intervention, il a été très froid, méthodique, cinglant, il ne me regarde pas, parle de risques très importants à mon stade de grossesse, signe des documents en toute hâte, me dit qu'il y a un médecin dans la clinique qui "accepte" cette monstruosité de faire des interventions jusqu'à 14 SA et me propose une intervention… 2 jours plus tard.
Le pire est que ce médecin apparemment très pressé, m'impose quand même de me faire une échographie afin "que je me rende compte" que c'est un enfant avec des bras, des jambes, des fesses…
Je suis anéantie, j'ai rdv le lendemain avec l'anesthésiste qui voyant mon état de fragilité en rajoute une couche: "vous voyez bien que vous n'avez pas envie, vous avez l'air d'être une personne d'honneur, gardez cet enfant! l'avortement est un crime mais la société le permet que voulez-vous!!"
Je ne suis de toute manière pas prête à introduire des produits pour dilater mon col le soir même et demande un délai de 3 jours pour accepter le processus. Le 1 er médecin refuse car je suis à 12 SA et 3 jours et que ça va à l'encontre de ses principes, et m'oriente donc vers le médecin qui accepte le délai légal de 14 SA.
Aujourd'hui c'est le week-end, je souhaite changer de clinique, lundi, pour ne pas affronter ces médecins. Je compte aller au bout de l'IVG car un enfant avec cet homme sera une vie de malheur garantie. Mon mari évidemment est très heureux, ce qui ne l'a pas empêché de me brutaliser et continuer son comportement méchant.
Je ressens énormément de culpabilité car effectivement le foetus est à un stade avancé. Mais je me sens sûre de ma décision. Votre site parle de "décriminalisation" de l'IVG, c'est exactement le sentiment que j'ai perçu face au corps médical: celui d'être une criminelle.
Aujourd'hui, je suis confrontée à un autre souci: faire cette IVG sans que mon mari ne le sache, car je n'exagère pas quand je dis qu'il me tuera s'il le sait. Je devrai affronter l'épreuve de lui faire croire que c'était une fausse couche. Traverser la période post-intervention seule va je pense être très dur…
Je ne peux pas savoir à l'avance si je vais être en dépression après l'intervention.. nous verrons bien. En tous les cas, je vous remercie pour votre site qui pour la 1ère fois apporte un côté dédramatisant à cette situation.


Zaza
J'ai avorté aux HUG le 14 septembre 2009 à 30 ans d'une grossesse désirée. Désirée oui, mais avant que mon mari n'ait une révélation en partant en voyage. Finalement la vie que nous partagions depuis plus de 11 ans n'allait plus. Il est parti fin juillet pour 15 jours en me disant des "je t'aime", "je veux un enfant de toi" et à son retour plus rien n'allait. Mais j'étais enceinte. Notre situation de couple se dégradait de jour en jour, nous avons donc décidé qu'il n'était pas raisonnable de laisser venir un enfant au monde dans cette situation. Qu'un enfant ne pourrait rien arranger, au contraire. Mon mari me jurait qu'on se sortirait de cette mauvaise passe. Par amour pour mon mari, par raison pour ce futur enfant et convaincue que notre couple ne pouvait s'en sortir que si nous restions pour l'instant à 2, j'ai avorté. L'intervention (aspiration et curetage) s'est très bien passée, tout le personnel était très attentif et empathique. Physiquement à part quelques douleurs légères de ventre qui sont apparues même pendant le 2ème cycle post-IVG, je n'ai rien eu. Je n'ai pas encore les résultats du contrôle fait 6 semaines après, mais visiblement tout a l'air normal.
La décision a été simple à prendre pour moi, je voulais une famille, pas juste un enfant.
Le lendemain de l'intervention j'ai découvert mon mari avec une autre dans notre lit. Nos 11 ans de vie commune se sont terminés instantanément.
Actuellement je suis partagée entre le soulagement de ne pas porter l'enfant d'un lâche et la douleur d'avoir anéanti un bonheur. Je suis convaincue que c'était la meilleure décision même si j'y pense encore en pleurant. Je pense qu'il est égoïste et irresponsable de vouloir un enfant si on ne peut pas lui offrir un foyer sain et aimant. Je ne regrette pas ma décision, mais je sais que je vais garder une douleur pendant encore un bon moment.


Corinna, 34ans.
L'IVG a eu lieu début 2008. J'étais vulnérable et j'avais besoin que l'on m'aime. J'ai rencontré cet homme après m'être séparée de mon époux. Très vite, il a commencé à influencer ma vie. La grossesse est venue sans que j'aie vraiment voulu. Même pas un mois ensemble, cet homme m'a insultée, alors je l'ai mis à la porte. Trois semaines après son départ, j'ai fait un test de grossesse et c'était positif. J'ai réfléchi encore et encore comment j'allais faire. J'avais ma fille. Je n'avais pas d'emploi. NON, je ne pouvais pas assumer ça. J'ai pris la décision d'interrompre cette grossesse. Mon gynécologue m'a beaucoup soutenue. La clinique m'a bien accueillie. J'ai pris 2-3 comprimés et tout s'est bien passé. Je suis venue seule et rentrée seule. Je n'ai pas à me plaindre de ce qui m'est arrivé dans la vie. Je veux surmonter et en tirer de bonnes leçons. Aujourd'hui je suis là! Je ne regrette pas. Je me sens libre. Je suis la seule personne qui puisse prendre bien soin de moi entièrement. Merci à mes parents, ma fille, et à l'amour.


Prisca
2 heures de retard de règles (un peu exagéré, mais pas loin), et je commence déjà à planifier un avortement !
Quand comme moi on présente des contre-indications pour la pilule et le stérilet, la contraception est quelque chose d'assez fastidieux à gérer à la longue (préservatif, cape cervicale+spermicides, ne sont pas super fiables). Je me suis procuré une pilule du lendemain pour l'avoir sous la main "au cas où"… J'ai même un stock de sticks urinaires de labo pour doser la betaHCG chez moi (tests réguliers, même sans "doute") afin de pouvoir intervenir au plus tôt…
Ma décision serait vraiment irrémédiable au cas où je tomberais malgré tout enceinte, car je ne peux et ne veux absolument pas avoir d'enfant. Ma seule option en cas, malgré tout, de grossesse, est l'IVG, et si possible par RU486. Et je demanderai solennellement une stérilisation par la même occasion !
Vous l'avez compris, je n'ai encore jamais eu à avorter. Mais ma meilleure amie, deux fois. Elle m'a beaucoup soutenue ces derniers jours où j'ai dû m'inquiéter sérieusement, mais je n'ai jamais cédé à la panique, je savais ce que je voulais. Par contre, c'est vraiment très difficile de savoir où s'adresser… surtout quand on a plus de 16 ans ! (j'en ai le double ;-))
Je vous écris surtout pour vous remercier d'exister ! Grâce à vous, j'ai trouvé des informations très précises. MERCI !


Claudine
C’était en 1974 (avant la légalisation de l’avortement. Ndlr). Mes souvenirs sont d’être allée chez un personne qui pratiquait les avortements. Je suis allée avec le père de cet enfant que je portais et j’étais enceinte de 5 mois. Lui n’en voulait pas. Je l’aimais. C’était dans un quartier de Paris où je me souviendrai toujours de cette pièce. Les aiguilles à tricoter et puis le papa avait pris une chambre à l’hôtel Terminus, Versailles rive gauche. J’ai beaucoup souffert, mais cela n’a pas marché. Il a fallu revenir chez cette personne pour recommencer les aiguilles…
Et deux nuits après, avec toutes les douleurs que cela peut comporter, le bébé est sorti. Je me souviendrai toujours d’avoir vu ses mains, mais mon compagnon m’a maintenu que j’avais rêvé car un enfant à cinq mois n’était pas formé. J’ai cette image plus de 30 ans après. Mon compagnon a pris ce bébé dans une serviette et il a été l’enterrer dans un bois. Je ne sais pas où et je n’en ai jamais fait mon deuil de cet enfant. Ensuite il m'a laissée seule car il partait pour rejoindre son enfant à lui qui avait 6 ans à l'époque, car il était divorcé !! me laissant expliquer aux patrons de l'hôtel que j'avais eu mes règles et que j'avais tout taché !! Je suis restée seule, j'ai fait une infection qui a nécessité un curetage et on m'a dit que je resterais stérile.
J'ai revu cet homme, et j'ai voulu prouver que je pouvais être maman et j'ai eu une magnifique petite fille et par la suite un garçon. Nous nous sommes mariés (et oui l'amour qu'on peut avoir pour une personne quand on est jeune fait faire n'importe quoi) et le pire, je me suis retrouvée enceinte en 1985 et là il n'en voulait pas et je me suis fait avorter en milieu hospitalier, la douleur et le ressenti sont moins forts que pour cet avortement subi en 74, mais moi je voulais garder cet enfant, lui non et j'ai obéi. J'en suis toujours malheureuse, j’ai 54 ans et c'est toujours présent dans ma vie. C'est une souffrance permanente que le père a toujours niée. Depuis j'ai divorcé, il m'a laissée avec pas grand chose ce monsieur, mais cette absence est épouvantable pour moi et en plus sachant qu'il avait donc un fils d'un premier mariage que j'ai dû élever car sa mère n'en voulait pas !!!
Avec ma fille qui est infirmière maintenant on en a discuté et elle comprend, mais n'aime pas en parler. Mon fils depuis mon divorce et avant n' a jamais voulu aborder le sujet.


Cora
J'ai eu un IVG par aspiration à 11 semaines à la Polyclinique Universitaire de Bâle le 30 décembre 2008. J'ai 40 ans, je suis divorcée et j'ai un ami depuis 5 ans.
J'avais désiré un enfant avec mon mari 10 ans auparavant. Souffrant d'un syndrome ovarien micro-polychistique, j'ai eu tout l'arsenal médicamenteux possible pour stimuler mon ovulation… sans succès et avec une détresse psychologique immense. Ceci m'a coûté mon mariage… Pour retrouver un but à mon existence, j'ai consulté un psy et réorienté ma vie, sans enfant. J'ai rencontré mon ami et l'accord de départ était : il ne veut pas d'enfant, très bien, je ne peux pas en avoir ! Jusqu'à ce jour de décembre où j'ai cru à une mauvaise plaisanterie de mon médecin qui m'annonçait que j'étais enceinte.
J'ai subi un choc terrible : je n'avais pas senti mon corps, je m'étais moi même persuadée que j'étais stérile et pourtant…
J'avais vraiment tourné la page et envisagé un futur très différent. Mon ami et moi avons passé des heures à peser le pour et le contre. A 40 ans, j'avais l'impression que mon corps ne supporterait pas cette grossesse. J'avais eu de nombreux problèmes avec les traitements hormonaux (pris 15kg, des jambes constamment gonflées etc) et je n'envisageais pas de revivre ça, y compris l'environnement médical.
Cet enfant était pourtant une 'belle surprise de Noël' selon mon médecin, mais plus pour moi. J'ai ressenti de la colère, de l'injustice et de la tristesse.
J'ai été accueillie et accompagnée merveilleusement par le personnel de la Clinique, avec beaucoup de chaleur et de compréhension. A aucun moment je n'ai eu l'impression d'être jugée.
Je n'ai pas souffert de l'intervention, mais je dois reconnaître que psychologiquement je vis encore quelques heures difficiles. Le regard de la société sur l'avortement est très lourd et inconsciemment pèse, mais je reste persuadée aujourd'hui que nous avons fait le bon choix. Et je vous remercie de permettre de consulter ce genre de témoignages et de dédramatiser ces situations qui sont des choix de vie personnels et respectables.


Michèle
j’ai subi une IVG il y a plus de 8 mois, je suis tombée enceinte car j’avais oublié de prendre la pilule une fois. Ma situation personnelle n’était pas forcément la plus simple car je suis jeune, je n’ai que 20 ans, et je vis actuellement chez le père de mon ami. Nous n’avons pas de situation stable malgré tous les efforts que nous faisons pour trouver du travail … Le motif de cet IVG a été financier, matériel, je pense que j’étais prête personnellement à avoir un enfant malgré mon jeune âge, mais avant tout ça il faut que nous soyons bien tous les deux, que nous puissions accueillir un enfant avec amour et confort! Malgré tout cela lorsque j’ai su que j’étais réellement enceinte, inconsciemment je me suis accrochée à cet “enfant”, je m’imaginais tout et je ne voulais pas m’en séparer même si je le devais pour son bien-être (c’est bête de dire “pour son bien-être” alors que je l’ai avorté). Bref dans ma tête c’était déjà mon enfant, je ne sais pas trop comment l’expliquer.
Avant l’IVG j’avais peur de regretter ensuite, de me sentir coupable, de remettre la faute sur mon ami…je me posais des milliards de questions. Je suis donc allée voir mon médecin en lui expliquant mon cas, il m’a envoyée vers l’hôpital où une dame m’a expliqué les deux procédés d’IVG, elle m’a demandé comment cela était arrivé et m’a ensuite demandé quelle méthode je souhaitais. J’ai donc “choisi” l'intervention chirurgicale, je ne voulais pas être consciente de ce qui allait se passer. Lorsque je suis entrée à l’hôpital, le personnel n’était pas vraiment aimable, je me sentais encore plus en faute, bref pas un très bon souvenir.
Après l’intervention j’ai le souvenir d’avoir dit “une bonne chose de faite”, je me rendais pas compte de ce qui se passait, tout s’est passé si vite, je n ai pas eu le temps de tout assimiler. Physiquement et moralement après l’IVG tout allait bien, j’y pensais certes mais ça allait. Mes pensées avant l’IVG, c’était plus de la peur qu’autre chose, après c’était un soulagement, mais maintenant et c’est bien là le problème, je suis obnubilée par l’idée de tomber enceinte. Je ne rêve que de ça tout en sachant qu’il ne faut pas, car je suis toujours dans la même situation et qu’en aucun cas nous pourrions rendre un enfant heureux.
Au final, je ne sais pas si c’est la meilleure solution, pour un enfant je pense que oui, mais pour moi je ne pense pas que cela a été la bonne solution (pourtant cela aurait été égoïste de poursuivre la grossesse, je pense).
Je souhaite bon courage à chaque couple qui est ou malheureusement passera par cette étape. Je pense que dans ce genre de situation il faut beaucoup parler avec son compagnon. On a tendance à imaginer que seules les femmes souffrent de cette situation, mais les hommes aussi. Vous êtes deux dans cette histoire et pensez à votre compagnon qui lui souffre peut être en silence.


Annelise
Je me suis fait avorter à l’hôpital d’Amboise, la situation c’est que je prenais la pilule normalement et je suis quand même tombée enceinte. J’avais fait un changement de pilule pas longtemps avant d’apprendre ma grossesse par test. J’habite avec mon copain, on était peut-être trop jeunes, immatures et pas de situation stable niveau financier. On ne voulait pas que le bébé manque de quelque chose à n’importe quels moments de sa vie. Faut le vouloir ce petit être, c’est pas une décision à la légère et on a bien réfléchi à tout ça. A l’hôpital, toute l’équipe médicale était très gentille avec moi, rassurants, on m’a mise en confiance alors que j’avais la trouille, mais ça c’est bien passé, j’étais endormie entièrement, je n’ai rien senti. Au réveil, quelques douleurs, mais assez supportables, c’était par aspiration. J’ai eu des infections urinaires ensuite, rien de trop grave, j’avais pas trop le moral. J’essaye d’être forte et de dédramatiser les choses, j’ai tout ressenti, de la tristesse, de la colère, des regrets, mais je pense que c’était la bonne décision.


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