Avortement - Interruption de grossesse : Pour le droit au libre choix



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NOUVELLE RÉGLEMENTATION DE L'INTERRUPTION DE GROSSESSE:

Non à l'entretien obligatoire

Madeleine Denisart, professionnelle des entretiens pré-IVG et membre de l'Association suisse pour le droit à l'avortement et à la contraception (ASDAC), donne quelques arguments qui lui font refuser l'entretien obligatoire.

Les professionnels qui eux-mêmes pratiquent des entretiens psychosociaux ont fait savoir qu'un entretien obligatoire perd son sens. Le but d'un entretien est de profiter à la personne qui consulte, ce qui n'est pas possible s'il s'agit d'une mesure coercitive.

Le devoir du médecin

Dans ce débat, il y a une confusion au départ. Les milieux qui veulent imposer l'entretien font croire qu'il permettra aux femmes de partager avec une personne compétente le motif de leur désir d'interrompre leur grossesse, de trouver un soutien, alors que sans l'entretien obligatoire elles seront abandonnées à elles-mêmes, dans ce moment difficile. Tel n'est pas le cas puisque le constat de grossesse, son évaluation médicale est nécessaire. Pour répondre à la femme et lui offrir des soins satisfaisants, le médecin doit aussi comprendre le contexte de cette grossesse, le motif de demande d'IVG.

Comme pour toute intervention médicale on peut espérer un dialogue entre le médecin et sa patiente. La formation psychosociale des médecins reste certes à améliorer, et pas seulement dans le domaine de l'IVG. Mais l'entretien obligatoire ne va pas dans ce sens: rendre l'entretien obligatoire par une autre instance médicale ou psychosociale ne va pas contribuer à pousser les gynécologues concernés à être partie prenante de ce soutien psychosocial et à améliorer leurs prestations autres que techniques. L'important c'est que l'IVG ne soit plus considérée comme un acte médical dégradant. L'IVG fait partie intégrante des prestations de soins avec des techniques médicales, d'accueil et de soutien appropriées, toujours à améliorer.

Un protocole de suivi en dehors du code pénal

Pas besoin d'un article de loi pour mettre en place un protocole de suivi de l'IVG. Ces protocoles se mettent en place dans le cadre de programmes de santé publique et des services de soins et non dans une loi pénale. C'est aujourd'hui le cas pour les tests HIV/SIDA où le test est précédé d'un entretien d'information qui tient compte de la situation particulière de la personne qui consulte et qui permet d'offrir le soutien nécessaire. Tel est aussi le cas dans plusieurs services de traitement de la stérilité ainsi que lors de demandes de stérilisation féminine ou masculine. Dans tous les domaines qui concernent la vie intime et sexuelle, la procréation, il est important d'offrir aux consultant-e-s la meilleure qualité d'information et de soutien de la part d'une équipe pluridisciplinaire. C'est important lors d'une fausse couche, lors de naissances prématurées ou présentant des problèmes de santé ou lorsque l'enfant est mort-né.

La mise en place de ces protocoles permet aux équipes une réflexion en profondeur, une valorisation de leur travail, ce qui n'est certes pas le cas pour l'IVG dans le cadre d'une loi restrictive.

Les femmes immigrées: un faux argument

L'entretien obligatoire est parfois présenté comme le seul moyen de faire passer la prévention auprès des femmes qui vivent des situations précaires: requérantes d'asile, femmes immigrées ou au noir. L'utilisation de femmes d'autres cultures pour diviser les femmes en plusieurs catégories afin de faire passer une loi restrictive est particulièrement déplacée. De plus nous voyons mal pourquoi un entretien imposé profiterait plus aux femmes immigrées qu'aux Suissesses.

Les femmes immigrées utilisent précisément le plus souvent les services publics où des prestations de soutien sont déjà offertes. Imposer un entretien ne sert à rien. L'essentiel est d'améliorer la qualité de ces prestations, dans tous les domaines de la santé, accompagnées de traduction et de moyens de compréhension mutuelle entre soigné-e-s et soignant-e-s de cultures et de langues différentes.

Evitons les erreurs faites ailleurs

C'est dans le Code pénal que l'obligation d'entretien serait inscrite, ce qui n'est de loin pas anodin. Cela signifie qu'on garde la logique de la mise sous tutelle de la femme. On remplace simplement l'obligation de l'avis conforme par l'obligation de l'entretien, pour que la femme obtienne la permission d'interrompre sa grossesse.

La Suisse peut aujourd'hui s'appuyer sur des années d'expérience du régime du délai dans différents pays européens. Évitons les erreurs faites ailleurs. Dans tous les congrès, les professionnels allemands racontent les difficultés occasionnées pour eux et pour les femmes depuis que l'entretien obligatoire est inscrit dans la loi.

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